Stanislavski, Strasberg, Adler, Meisner : au centre de tout ça, l’acteur comme instrument...
- Le Théâtre du Mauvais Garçon
- 14 sept.
- 2 min de lecture

Strasberg : l’introspection comme vérité
Lee Strasberg a marqué des générations d’acteurs par sa méthode centrée sur la mémoire affective. L’idée était simple et puissante : puiser dans ses propres souvenirs pour nourrir le jeu, retrouver une émotion vécue et la transposer sur scène. Cela a donné des performances inoubliables, d’une intensité brute, et contribué à créer la légende de l’Actors Studio.
Mais j’ai vu aussi les dérives de cette approche. Des jeunes acteurs, souvent fragiles, poussés à revisiter des blessures personnelles sans filet. Des cours où l’on confondait art et thérapie. La recherche de vérité devenait parfois une épreuve psychologique, laissant des cicatrices au lieu d’outils.
Adler : l’imagination et la grandeur de l’art
Stella Adler, qui avait travaillé directement avec Stanislavski, s’est opposée à cette dérive. Pour elle, le théâtre n’était pas un exercice de confession intime. L’acteur devait s’élever, élargir son horizon par l’imagination, l’analyse du texte, la compréhension du contexte historique et social.
Avec Adler, on cesse de rapetisser l’art à la taille de sa vie privée. On l’ouvre, on l’élève. L’acteur devient un citoyen, un témoin, quelqu’un qui prête sa voix et son corps à un monde plus vaste que lui. Sa pédagogie rappelle que l’imagination est un moteur au moins aussi puissant que la mémoire.
Entre Adler et Strasberg : ma pratique
Pour ma part, je me situe souvent entre ces deux pôles. Car sur scène, je n’ai d’autre instrument que moi-même : ma voix, mon souffle, mon corps, mes émotions. Le personnage naît précisément dans cette rencontre entre ce que je suis et les circonstances qui ne sont pas les miennes.
Pourquoi choisir ? Si une mémoire personnelle me nourrit, je peux l’utiliser. Si l’imaginaire et les circonstances suffisent, je m’y appuie. Le but n’est pas de se soumettre à une école, mais de rester vivant, présent, disponible.
Meisner : la révélation de l’instant
En approfondissant cette réflexion, j’ai découvert Sanford Meisner. Et je dois avouer qu’en le lisant, je me suis reconnu. Sa méthode met l’accent sur le comportement vrai, sur l’écoute et la réactivité. Dans ses exercices de répétition, il ne s’agit pas de fouiller en soi ni de bâtir un univers imaginaire complexe, mais simplement d’être là, attentif, ouvert à l’autre.
Sans le savoir, j’étais déjà partisan de cette vision. Ce que Meisner propose rejoint ce que je cherchais instinctivement : la vérité dans la présence, dans la relation, dans l’instant.
Rester au centre
Finalement, je crois que je reste au centre de tout ça. Entre mémoire, imagination et instant présent. Entre moi et le personnage. Ce centre n’est pas une hésitation, mais une manière d’habiter le métier. Une façon de concevoir le jeu qui accueille la complexité plutôt que de la nier.
Peut-être que c’est là, au fond, le vrai legs de Stanislavski. Non pas une méthode unique, mais une recherche vivante, un chemin ouvert que chacun arpente à sa manière. Et sur ce chemin, je choisis d’habiter l’espace du milieu, là où se croisent Strasberg, Adler et Meisner.



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